Sur fond de contestation des réseaux de soins par beaucoup d'opticiens, le député Daniel Fasquelle va déposer une proposition de loi visant, "au nom de la justice", à les supprimer.

Est-il encore possible de revenir en arrière et de supprimer les réseaux de soins ? Daniel Fasquelle (photo) veut le croire. Ce député de l'opposition (Les Républicains, ex-UMP) a rédigé une proposition de loi en ce sens, dont il a présenté les grandes lignes jeudi dernier. Au moment où certains opticiens font entendre leur mécontentement à propos de certains réseaux de soins, l'élu s'érige en défenseur de la justice : "Les réseaux de soins ont soi-disant été créés au nom de la justice. Or, dans les faits, ils ont créé de l'injustice, à travers, notamment, le principe des remboursements différenciés", a-t-il fait valoir lors de sa conférence de presse commune avec Frédéric Bizard, cet enseignant à Sciences-Po qui a remis, lui, un rapport préconisant la suppression pure et simple de tous les réseaux conventionnés. Pour Daniel Fasquelle, au moins trois raisons justifient son action. Un : contrairement à ce que leurs promoteurs affirment, les réseaux ne faciliteraient pas l'accès aux soins, estime le député qui en veut pour preuve un taux de renoncement aux soins toujours aussi élevé en France. Deux : le coût de ce système. "Une plateforme de santé c'est un intermédiaire en plus, un échelon très coûteux, en témoigne l'importance de leurs frais de gestion", fait observer le député. Et d'ajouter : "Ce coût conduit à proposer une offre de soins dont le niveau de qualité est discutable". Et de trois : M. Fasquelle considère que les réseaux de soins remettent en cause "et la liberté d'exercice des professionnels de santé, et la liberté de choix des patients". Autant d'arguments qui, sans être nouveaux, loin de là, lui semblent cependant plus que jamais défendables. "Remboursements différenciés, situation de concurrence déloyale… l'injustice, ça suffit", déclare-t-il.

Et maintenant, la question qui fâche : cette proposition de loi a-t-elle raisonnablement des chances d'aboutir d'une façon ou d'une autre ? Quand on interroge certains représentants de la profession, les commentaires se font plutôt sceptiques. Venant de l'opposition, cette démarche législative emprunte en effet un chemin étroit. En clair, entend-on ici et là, une telle proposition a, sauf surprise, peu de probabilités d'avoir une finalité concrète. À entendre bien des acteurs et des observateurs du secteur, l'enjeu serait donc ailleurs : dans la médiatisation que la proposition de loi Fasquelle apportera sur la question des réseaux de soins en général et des remboursements différenciés en particulier. Même Frédéric Bizard, l'auteur du rapport anti-réseaux l'admet : "Cette proposition de loi et mon rapport, c'est là une première étape. Des pouvoirs publics au grand public, tout le monde va pouvoir s'emparer de cette question. Et les OCAM eux-mêmes devraient commencer à sérieusement s'interroger sur un système qui, objectivement, ne fonctionne pas".

Réagissant de son côté, le gouvernement ne semble pas du tout réceptif, bien au contraire. Le ministère de la santé n'en démord pas : "Les réseaux de soins doivent permettre aux assurés de bénéficier, du fait du pouvoir de marché des organismes complémentaires, d’une amélioration du rapport qualité/prix et des services offerts par un certain nombre de prestataires, notamment en matière d’optique". Le ministère oppose une fin de non-recevoir à tous les arguments mis en avant contre les réseaux, défendant une fois de plus le fait que "l’adhésion des professionnels, établissements ou services à ces conventions s’effectue sur la base de critères objectifs, transparents et non discriminatoires et que l’adhésion ne peut comporter de clause d’exclusivité. Tout professionnel, établissement ou service répondant aux critères mentionnés peut adhérer à la convention, à l’exception des conventions concernant la profession d’opticien-lunetier, qui peuvent prévoir un nombre limité d’adhésions".

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