Nous avons rencontré les directions générale et française de Safilo. L’occasion d’un échange sur la stratégie du n°2 mondial, qui se pose en « alternative indépendante » face à la nouvelle entité EssilorLuxottica et aux géants du luxe (Kering, LVMH), et se dit « plus que jamais à l’écoute des opticiens sur le terrain ».

La semaine dernière, la presse professionnelle a rencontré la direction de Safilo pour un échange de vues. Angelo Trocchia, qui a pris ses fonctions à la tête du groupe au printemps 2018, était de passage à Paris, secondé pour l’occasion par Carole Binet, en charge du marché français (et du Bénélux) qu’elle connaît par coeur. Le président italien a d’abord tracé les grandes orientations du groupe et identifié ce qui constitue selon lui ses atouts. En premier lieu, il a insisté sur la « solidité financière » de la société qui a effectué, en fin d’année, une augmentation de capital à hauteur de 150 millions d’euros. « Une santé et une stabilité financières » qui permettent au groupe de diversifier ses investissements aussi bien en matière de nouveaux process industriels dans ses usines transalpines qu’en ce qui concerne « la digitalisation de l’entreprise ». Sur ce dernier point, Angelo Trocchia évoque une stratégie à double détente, à la fois en termes de e-commerce et de communication, et toujours dans une perspective BtoB. Surtout, il a tenu à redire le changement d’état d’esprit du groupe qui fonctionne désormais en mode décentralisé. Chaque marché ayant ses spécificités, la règle est maintenant celle de l’adaptabilité : « Pour être toujours plus efficaces, nous devons être connectés aux attentes précises du marché français, coller à ses besoins particuliers. » Cette approche locale et non plus globale de chaque zone commerciale, donc la prise en compte de chaque écosystème, c’est la « condition première de l’agilité », estime Angelo Trocchia. Une façon de voir et de faire largement approuvée par Carole Binet qui pilote depuis des années les opérations de Safilo dans l’Hexagone.

Après « une année 2018 compliquée » (marché du solaire au ralenti, débats autour de la réforme du RAC 0…), la responsable du marché français considère que tous les outils internes sont en place pour dynamiser l’activité des opticiens : « Nos partenaires nous ont fait part de leurs attentes. C’est l’écoute et cette proximité concrète qui vont nous permettre de mieux les accompagner aujourd’hui et demain ». Merchandising, communication, formation, offre produits, Safilo France veut par exemple aider les opticiens, sous enseigne ou indépendants, à se positionner plus favorablement sur le segment solaire, en plano mais aussi et surtout en correcteur : « Il leur faut reconquérir cette catégorie qui leur échappe et dont le potentiel est énorme », ambitionne Carole Binet. Les conditions commerciales ont également été révisées dans un souci de clarté et de compétitivité : « Nous avons revu la garantie qui passe à quatre ans contre deux auparavant. Pour alléger leur trésorerie, nous donnons la possibilité aux opticiens de fonctionner en flux tendus avec des réassorts constants. De même, nous offrons maintenant le franco de port dès la première pièce. Ajoutons enfin à cela que nous mettons à disposition des pièces détachées sur d’anciennes montures, y compris sur celles qui sont sorties de collection », détaille très concrètement Carole Binet. Ajoutant : « Ce sont autant d’investissements pour favoriser le business des opticiens en magasins ».

Et que prévoit Safilo France avec l’entrée en vigueur l’année prochaine de la réforme 100 % Santé ? Là encore, Carole Binet se veut précise et constructive : « Notre but est d’accompagner les opticiens pour leur apprendre à vendre du reste-à-charge, notamment à travers notre service dédié de formation (une équipe mobile de quatre personnes_ndlr) ». Parallèlement, elle annonce un repositionnement de certaines collections pour satisfaire aux exigences de la réforme : « Nous allons proposer des produits (Fossil, Max&Co, Pierre Cardin notamment_ndlr) qui cadreront avec les nouveaux paniers de remboursements plafonnés à 100 euros. Certaines lignes pourront même entrer dans le cadre du RAC 0 », explique Carole Binet en prenant l’exemple, pour ce dernier point, de Polaroid. « C’est la diversité de notre portefeuille de licences - trente à ce jour - qui permettra aux opticiens d’affiner et d’ajuster leurs offres en fonction de leur clientèle », complète-t-elle. Signalons pour finir que les « marques piliers » du chiffre d’affaires de Safilo dans l’Hexagone sont avant tout Dior, Carrera, Marc Jacobs et les différentes lignes Boss. Quant à Polaroid, Tommy Hilfiger, Pierre Cardin mais aussi et surtout Jimmy Choo et Givenchy, elles apparaissent comme des marques connaissant un succès grandissant sur le marché français. 

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