La France est l'un des rares pays européens à ne pas contrôler l'aptitude à la conduite des seniors. Mais cela pourrait peut-être changer…

Passé 70 ans, est-on encore apte à prendre le volant ? Pas toujours, estime le sénateur centriste Yves Détraigne. C'est pourquoi il a soumis une proposition de loi sur la mise en place d'un contrôle médical d'aptitude à la conduite. Seulement voilà, elle a été rejetée mi-juin. "Je n'ai pas obtenu un grand enthousiasme de la part de mes collègues", admet le sénateur de la Marne. "On m'a opposé deux choses, détaille-t-il dans les colonnes d'un quotidien régional : la première est que les personnes âgées ne sont pas responsables de plus d'accidents que la moyenne. La deuxième est qu'il y a une différence entre les gens qui vivent en milieu rural et ceux qui sont en ville. Pour les ruraux, la voiture est un élément indispensable pour garder une vie sociale". Renvoyée en commission des lois, la proposition a au moins permis la constitution d'une groupe de travail qui, normalement, examinera le sujet dès la rentrée. «Nous sommes un pays de plus en plus isolé. Le permis de conduire est donné à vie alors qu’ailleurs il l’est pour une durée limitée. Ceux qui sont délivrés depuis le mois de janvier, le sont pour quinze ans, mais leur renouvellement ne sera sans doute qu’administratif », souligne encore le sénateur.

L'élu centriste n'est pas le seul, du reste, à s’interroger sur ce qui apparaît pour beaucoup comme un tabou. Dans le cadre du projet de loi dépendance, Luc Broussy, conseiller général du Val d’Oise, a rédigé un rapport contenant plusieurs mesures pour anticiper l’augmentation de la part des personnes âgées dans la population française à l’horizon 2030. Parmi les pistes de ce rapport figurent des stages de remise à niveau dans des auto-écoles, la possibilité d’un autocollant signalant que le véhicule est conduit par une personne âgée (comme cela se fait au Japon) ou encore l'évaluation des capacités visuelles et cognitives. Évaluation, contrôle, examen, quelle que soit la forme que pourrait prendre le contenu d'une loi pour les seniors, elle est jugée d'avance problématique par certains. C'est le cas de Florence Leduc, présidente de l’Observatoire de l’âgisme : "Ne cibler que les seniors reviendrait à de la discrimination. On refuse un véhicule à une dame de 80 ans qui sort d’un stage de sécurité routière et on tend les clés à une trentenaire qui a fumé de l’herbe et téléphone au volant. Le sujet, ce n’est pas l’âge des vieux. Mais l’âge de tout le monde associé à des pathologies ou des comportements dangereux ». Même son de cloche du côté de la ministre des Personnes âgées, Michèle Delaunay : « N’importe quelle personne âgée obtiendrait gain de cause devant la Cour européenne des droits de l’homme : c’est de la discrimination ».

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